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Le secteur rural des régions d’Agadez et de Tahoua
Les régions d’Agadez et de Tahoua présentent des atouts en termes de développement des filières agricoles : cultures irriguées et pluviales dans une certaine mesure, qui sont pourvoyeuses d’emplois diversifiés et de proximité.
La région d’Agadez
Deux tendances les plus lourdes au niveau de la région d’Agadez sont liées au climat et à la dispersion géographique. Les précipitations sont rares dans le temps et l’espace, la moyenne ne dépasse guère 250 mm/an offrant ainsi très peu des possibilités en matière des pratiques agricoles pluviales.
La région d’Agadez possède la caractéristique d’un bassin de production très important pour l’oignon d’hivernage, la pomme de terre, le chou, l’ail ainsi que pour l’arboriculture fruitière. La tomate est en régression au profit d’une extension des surfaces en oignon, plus rémunérateur et plus facile à commercialiser.
La commercialisation se fait à travers des réseaux privés et des unions de coopératives au niveau des marchés. La région étant peu desservie en matière de voies de communication du fait de l’étendue du territoire et de son relief, la commercialisation des produits est entravée notamment vers les centres urbains. Il existe cependant des expéditions de produits bien organisées vers d’autres régions du pays et des exportations dans la sous-région et au Maghreb.
La région n’est pas homogène sur le plan agricole et peut se subdiviser en zones :
– de cultures pluviales et de céréales de décrue et de maraîchage péri urbain autour de la ville d’Agadez ;
– de cultures irriguées majoritaires vers le Sud et le Centre de l’Aïr (Tabelot, Dabaga, Timia Tchirozérine) avec une prédominance de l’oignon et des spécialisations locales pour les autres cultures (ail, pomme de terre, tomate…) y compris arboricoles (agrumes, dattes, vignes, mandarinier) ;
– de culture de céréales majoritaires vers le Nord de l’Aïr (Iférouane) avec une tendance à la baisse de la production et à l’accroissement des cultures irriguées ;
– de cultures en cuvettes oasiennes dans le reste de la région.
L’agro-élevage y est pratiqué par tous (sédentaires et nomades). Ce type d’élevage exige toutefois des services de proximité spécifiques pour les éleveurs, notamment en termes d’appui aux filières porteuses.
L’Aïr concentre donc l’essentiel de la production agricole de la région et cette activité est en très forte expansion depuis ces trente dernières années, grâce notamment à la baisse du coût des motopompes. Cela se traduit par l’expansion des jardins dans les vallées et par la conquête de nouvelles zones agricoles. Il s’agit d’une agriculture intensive en intrants avec des coûts de production élevés.
Le principal facteur limitant pour l’expansion des zones de culture est l’accès à l’eau et cette situation est aggravée par la baisse des nappes due pour partie aux épisodes de sécheresse mais également à l’importance des prélèvements pour l’agriculture. En cas de mauvaise saison des pluies, la recharge de la nappe est insuffisante (d’une manière générale la profondeur moyenne des niveaux de puisage augmente) et oblige les agriculteurs à utiliser des techniques plus couteuses pour accéder à l’eau (contre puits, pompes immergées, motopompes en série). Les inondations sont fréquentes dans les vallées et, en fonction de l’intensité des flots, des jardins peuvent être emportés ou recouverts par d’importantes quantités de sable.
Les disponibilités en terre dans l’Aïr demeurent encore réelles, y compris pour les jeunes et les femmes. Les locations (bail et métayage) et parfois les ventes de terres sont pratiquées. On constate des déplacements saisonniers de jeunes des communes riveraines qui convergent vers Tabelot, par exemple, présentant une bonne disponibilité en terre. La valeur du foncier est liée à la proximité de l’eau mais des dispositifs de tuyaux et de motopompe permettent d’implanter des jardins à des distances importantes des puits (plusieurs centaines de mètres). Les tensions avec les éleveurs sont très réduites car il s’agit des mêmes populations, des mêmes familles, et la pratique de l’agriculture maraichère se généralise.
L’agriculture est une activité individuelle (famille très proche) qui peut être soit permanente soit occasionnelle, certains ne pratiquant l’agriculture qu’une partie de l’année et pas tous les ans. La main d’œuvre, importante et abondante, est fournie en grande partie par des travailleurs saisonniers provenant des régions voisines (Damagaram, par exemple). Les départs en exode des jeunes de la région sont limités par les opportunités qu’offrent aujourd’hui le développement de l’agriculture irriguée.
La structuration des producteurs sur des bases géographiques, en groupements, unions et fédération est très importante. La ville d’Agadez constitue le point de convergence de toutes ces organisations, que ce soit pour l’approvisionnement en intrant et équipement, l’accès aux services ou encore pour l’écoulement des produits.
Les principales contraintes à la production, outre l’accès à l’eau qui est la principale, sont le manque de capital pour démarrer l’activité, et singulièrement pour les jeunes et les femmes, le manque de formation et d’accompagnement technique, et la difficulté d’accès (distance) aux intrants et au carburant ainsi qu’à des semences et des plants adaptés et de qualité.
La commercialisation des produits constitue une préoccupation majeure de cette agriculture totalement orientée vers le marché. Les dispositifs de stockage sont insuffisants et ne permettent pas la conservation des produits en cas de mévente ou de baisse des prix sur le marché.
La Région de Tahoua
En zone Sahélienne, la région de Tahoua a un potentiel agricole élevé, grâce particulièrement aux aménagements réalisés par divers projets. La région est également riche en élevage qui reste une forme de capitalisation forte pour les agriculteurs.
La Région de Tahoua se trouve divisée en deux grands espaces : la zone pastorale au nord et une zone agricole, avec présence d’élevage sédentaire ou transhumant, au sud avec d’importantes zones de production maraichères disséminées au gré des vallées dans un espace où dominent les cultures pluviales de céréales et de niébé.
La région constitue un bassin de production pour l’oignon qui représente la majorité des surfaces emblavées, en dehors du mil et du sorgho.
Le développement socio-économique de la région de Tahoua est cependant contraint par un certain nombre de facteurs que l’on peut considérer comme étant des tendances fortes. Il s’agit d’abord d’un déséquilibre entre la croissance démographique (environ 3% annuel) et la croissance de la production agricole ce qui rend la région chroniquement déficitaire. Des contraintes naturelles existent telles que la profondeur excessive de la nappe phréatique dans certains départements de la région, en l’occurrence Bouza et Keita. Par ailleurs, il est observé une forte pression continue sur les ressources naturelles avec une menace de disparition d’une partie du capital productif, du fait notamment de l’ensablement des plans d’eau et de leur envahissement par les plantes et par des phénomènes de pollution.
La dégradation des terres est une constante importante dans la région de Tahoua. La protection des terres agricoles et des ouvrages, par la multiplication des interventions de conservation des eaux et des sols ainsi que la réalisation de haies vives et la promotion de l’agroforesterie constituent des priorités.
L’accès au foncier s’il ne pose pas de problème majeur pour les hommes adultes s’avère complexe pour les jeunes et pour les femmes. La réalisation d’aménagements constitue un moyen d’attribuer des terres à ces groupes mais le maintien de leur droit d’usage n’est pas toujours garanti, au-delà du terme de l’intervention (projet ou autre) qui a permis la réalisation des aménagements. La réalisation effective et la pérennité des aménagements ne sont pas toujours assurées, certains propriétaires contestant ou revenant parfois sur des décisions d’attribution.
On peut noter une certaine structuration professionnelle des acteurs locaux (bien que beaucoup d’opérations se passent encore de manière informelle), la présence d’une importante zone de concentration d’acheteurs étrangers et d’exportateurs nigériens et une offre de transport de plus en plus diversifiée. De nombreuses zones souffrent encore de l’enclavement en raison de l’absence ou de l’état des pistes qui les desservent. La transformation des produits, activité essentiellement féminine, est limitée à quelques produits comme la tomate séchée ou le moringa séché, en poudre ou en huile, et l’extraction d’huile d’arachide.
Le stockage commercial (warrantage…) est réalisé sur les céréales et le niébé. Le principal frein au développement de cette activité est le manque de magasins. D’importants besoins en infrastructures existent également pour le stockage individuel et collectif de l’oignon et pour la création de nouveaux comptoirs de vente, toujours pour l’oignon, mais également pour la tomate
L’exode traditionnel des hommes, jeunes ou adultes, semble largement freiné grâce au développement des cultures maraichères commercialisées et des opportunités qui en découlent en termes d’emploi, que ce soit dans la production ou les services. Cette question est d’autant plus prégnante que les migrations saisonnières sont contraintes par les difficultés de plus en plus grande d’accès aux pays limitrophes du fait des conflits et d’une dégradation des conditions sécuritaire, notamment.